Des bénévoles engagés dans l'équipe d'Alfortville témoignent de leur engagement
À l’occasion de la journée du bénévolat, Odette et Alain nous parlent de leurs engagements.
Cyril : Odette, tu es arrivée en 2014 au Secours Catholique, est-ce que je peux me permettre de te demander ton âge ?
Odette : Oui, j’ai 73 ans, bientôt 74, début janvier.
Cyril : Quelle est ton rôle ici ?
Odette : J’assure l’aide dans les démarches et des cours de français. En ce moment, j’anime un groupe de quatre personnes dont trois hispanophones. Comme je connais l’espagnol, je peux comprendre leurs difficultés. Une personne algérienne qui parle bien français, mais n’a pas appris à écrire en français mais sait écrire dans la langue arabe dans laquelle le sens inversé de l’écriture est compliqué. Une autre personne ivoirienne, qui n’est jamais allée à l’école, doit apprendre à écrire et à lire et c’est difficile d’apprendre à lire et à écrire à 19 ans. Une maman et sa fille, qui arrivent de Colombie. J'ai proposé que la fille vienne car elle aimerait bien aller à l’école. Elle avait des bons bulletins scolaires mais avant tout. Il faut qu’elle apprenne le français.
Cyril : Le cours de français a lieu une fois par semaine ?
Odette : Une fois par semaine, une heure et demie. Je les fais lire, parler, écrire aussi, parce qu’il faut qu’elles y arrivent, et puis je leur donne un peu de travail à faire pour la fois suivante, pas trop non plus, parce que je sais qu’elles ont aussi d’autres activités, mais pour qu’elles restent dans le bain, qu’elles n’oublient pas trop, d’une fois sur l’autre, tout ce qu’elles ont lu.
En Accueil-démarches, les demandes sont très variées Des personnes viennent pour faire des demandes de logement, des dossiers de retraite, des déclarations d’impôts …. et toutes les demandes de titres de séjour. C’est particulier, j’ai fait un peu de droit civil et de droit des affaires, je n’ai aucune connaissance du droit de la famille et du droit des étrangers, je découvre au fur et à mesure.
Cyril : Odette, pourquoi as-tu voulu être bénévole ?
Odette : Parce que je voulais m’occuper après ma retraite, donc je suis allée voir à la paroisse, la première chose qu’on m’a proposé était l’accueil des personnes en deuil, et j’avoue que ça ne m’emballait pas ; puis une paroissienne m’a conseillé : « d’aller au Secours Catholique ». J’ai donc rencontré Véronique, j’ai assisté à quelques séances et j’ai dit : « C’est bon, je me sens utile, donc j’y vais » et depuis, j’y suis toujours…
Cyril : Pour toi c’est quoi, l’accompagnement ?
Odette L’accompagnement c’est essayer d’aider les gens dans leurs démarches, de comprendre leurs difficultés et essayer de les aider à les résoudre. On n’y arrive pas toujours mais on fait en sorte de leur donner les moyens pour qu’ils puissent agir, et résoudre eux-mêmes leurs difficultés.
Cyril : Comment vis-tu ton engagement bénévole au sein de l’équipe ?
Odette : Je me sens intégrée, dans l’équipe ça se passe bien, on va à peu près tous dans la même direction, on ne s’évalue pas les uns les autres, on fait tous ensemble. Si quelqu’un rencontre une difficulté, il appelle un des autres bénévoles et tous ensemble, nous essayons de résoudre le problème. C’est vraiment une équipe.
Cyril : quelles sont les difficultés que tu rencontres au sein du bénévolat ?
Odette : Ce qui me gêne le plus est le manque de connaissances, parce que parfois je suis incapable de répondre. Alors effectivement, j’essaie de voir déjà avec les collègues, avec la délégation et puis je les renvoie vers d’autres associations qui me paraissent plus spécialisées. J'ai suivi plusieurs formations dont certaines m'ont marquées.
Cyril : Odette, en un mot c’est quoi le bénévolat pour toi ?
Le bénévolat…c’est être utile à la société, je pense.
Cyril : Alain, quel âge as-tu ?
Alain : J’aurai 70 ans cet été. C’est un cap !
Cyril : Tu es bénévole au Secours Catholique depuis combien de temps ?
Alain : Cela doit être depuis 2017.
Cyril : Quelle fonction occupes-tu en tant que bénévole : dans l’informatique ? l’aide dans les démarches ? les cours de français ?
Alain : Non, l’atelier de français j’ai arrêté pour reprendre la main sur les distributions de chèques service. Il ne s’agissait pas que nous devenions un distributeur de billets mais qu’on les donne à bon escient. Tous les jeudis soirs nous nous discutons en visioconférence pour évaluer les demandes que nous recevons en Accueil démarches. Quand on décide de ne pas répondre à cette demande, nous argumentons auprès de la personne.
Cyril : Y-a-t-il eu beaucoup chèques services attribués pendant la crise ? Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Alain Oui, les gens ont pris l’habitude, c’est au maximum une fois par mois, donc quand ils voient que le mois est passé en général ils reviennent demander s’ils peuvent avoir une aide.
Cyril : Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire du bénévolat ?
Alain : Je vais vous faire rire. C’est lors de mon pot de départ à la retraite de la Poste. Je travaillais avec une secrétaire qui en me conseillant d’aller dans une épicerie solidaire, m’avait dit : « je vous vois bien aller dans une épicerie solidaire, ça se passerait bien, vous êtes à l’écoute des autres, etc… ». J’y suis allé. J‘y ai rencontré Odette... Je lui ai demandé : « c’est quoi le Secours Catholique ? », je ne connaissais pas vraiment, j’en étais même un peu éloigné. Véronique m’a reçu et j’ai commencé en doublure avec une bénévole plus expérimentée.
Cyril : Et pour toi c’est quoi l’accompagnement ?
Alain : L’accompagnement, c’est prendre soin des gens, leur redonner confiance en eux pour qu’ils se sentent respectés, écoutés. Il y a quelques familles que j’accompagne, pour qui je prends des rendez-vous, que j’emmène à l'hôpital.
La reconnaissance, le respect des personnes ça me forme. Être bénévole ça vous forme, ça vous change. C’est aussi ça qui est important. Moi je ne travaille plus comme je travaillais à la Poste. Cela m’a changé. C’est aussi ça le bénévolat, c’est changer sa vision.
Cyril : Ton engagement, tu le vis bien au sein de l’équipe ?
Alain : Oui, oui. C’est drôle, quand je suis arrivé, j’avais des petites appréhensions. Quand on est bénévole, on est en apprentissage, on ne sait pas tout. Au début, je n'acceptais pas bien les conseils de comportements des autres bénévoles. Je réagissais comme si j’étais à la Poste, comme si j’avais un patron qui me faisait des remontrances. Puis à un moment, j’ai compris que c’étaient des conseils, que c’était pour me permettre d'évoluer, pour mieux accompagner les personnes accueillies. Dès que j’ai compris cela, tout s’est très bien passé. En équipe, nous savons que c’est nécessaire pour s’améliorer, et c’est vrai que je me sens bien.
Cyril : Donc tu te sens appartenir à une grande famille au sein du Secours Catholique ?
Alain : Oui tout à fait. Et c’est vrai qu’à la délégation, on a beaucoup d’échanges et de soutien avec l’équipe salariée. C’est ce qu’il y a de bien au Secours Catholique !
Cyril : Quelles sont les difficultés que tu rencontres dans ton engagement bénévole ?
Alain : D'être considéré par les personnes qui viennent nous voir comme sachant tout. C'est très frustrant de dire à quelqu’un : « On va se renseigner, on vous redonne rendez-vous, et on vous donnera la réponse ultérieurement. » Au début, il y avait de la difficulté à maintenir une ambiance saine, pour que les gens ne se braquent pas, mais après cette formation sur l’écoute on se remet en cause et on arrive à bien travailler avec eux, et à bien les accueillir. L’irritant est que les intervenants de l'espace départemental des solidarité (EDS) ou du centre communal d'action sociale (CCAS) nous adressent des personnes en leur disant : « Vous allez voir un écrivain public. » Alors on leur explique que l'on ne l'est pas vraiment, mais avec les documents et les notes que l'on rédige, les recherches, on va plus loin.
Cyril : Et pour toi en un mot, c’est quoi le bénévolat ?
C’est le service des autres et le fait que ce soit désintéressé. On n’a pas d’a priori. Ça donne une indépendance. C’est aussi de rendre les gens heureux, d’essayer de les faire se sentir bien.
Cyril : Merci beaucoup pour vos témoignages !